L’histoire réunit le destin de nos pays une nouvelle fois. Sauf que cette fois ceux qui nous lient ne sont ni les Sultans et les Pachas, ni l’impérialisme. C’est le peuple ordinaire de nos pays, les ouvriers et les chômeurs, les gagne-pain et les femmes au foyer, les retraitées et les jeunes, surtout les jeunes, les jeunes femmes et les jeunes hommes de nos pays qui se sont réunis pour créer un futur meilleur.
Quelle audace et quel enthousiasme de voir occupées les rues et les plus grandes places de nos pays par de centaines de milliers, voire de millions de personnes début juin en Turquie et fin juin en Égypte ! Quel grand espoir et optimisme pour le futur du Moyen-Orient et d'Afrique du nord !
Pendant deux ans et demi, vous vous êtes battus contre les Moubarak, les Morsi, les Tantawi, toutes les forces réactionnaires et oppressives d’Égypte. La place Tahrir est devenue le plus grand symbole de résistance grâce à votre force ! Vous avez fait peur à tous les oppresseurs du monde avec votre révolution ininterrompue. Vous avez donné plus de milles martyres et nous courbons la tête devant leurs souvenirs.
Pendant ces deux ans et demi, nous avons appris de vous et nous avons eu manque de rébellions contre nos despotes et exploiteurs. L’impérialisme d'USA et de l'Europe vous a offert le modèle de la Turquie, avec ses néolibéralismes, son Islamisme modéré et son gouvernement captif à l’impérialisme. Cependant, nous, les révolutionnaires de la Turquie, nous avons pris comme modèle l’Égypte lui-même. Nous étions déterminés de créer une autre place Tahrir à la place Taksim, la place centrale d’Istanbul.
Et nous voilà ! La nuit du 31 mai en Turquie à Istanbul le peuple s'est révolté et le plus grand combat a été donné sur la place Taksim. Cette révolte du peuple s'est faite en deux étapes. Du 1er au 15 juin la première étape a été réalisée au Taksim Gezi parc et s'est vite développée dans toutes les places centrales de la Turquie. Le gouvernement et les forces de police ne pouvaient plus entrer dans ces places occupées et la vie commune s'y est installée. Ensuite, le 15 juin le parc Gezi de Taksim et toutes les autres places libérées de la Turquie ont été vidées par les forces de police. Après, le mouvement s'est déplacé et s'est installé dans des parcs de quartiers pour créer des « conseils du peuple » et organiser des débats sur le futur de la révolte.
Le jour du 30 juin, à Tahrir, Ittihadiya et partout en Egypte, des millions de personnes sont de nouveau descendues dans les rues et les rebelles / révolutionnaires de la Turquie ont été inspiré de nouveau de cette force. En deux ans et demi, vous avez renversé trois tyrans !
Chez nous, le mouvement n'est pas encore assez mûr pour renverser notre tyran. Mais nous y parviendront ! Cela demande de la patience, du courage et du travail. Quand on dit ``travail``, c'est dans les deux sens du mot : à la fois travailler sans se fatiguer et unir le mouvement avec les classes travailleuses. Chez vous, la classe ouvrière était un acteur formidable du premier moment, avec des grèves et d’autres types d’action et avec la formation d’un mouvement syndical indépendant. En Turquie aussi, il faut amener la classe ouvrière dans le mouvement avec ses propres demandes et ses propres méthodes de lutte.
Même si nos mouvements se trouvent à de différentes étapes, un point commun nous rapproche. Ces derniers temps, dans nos deux pays les acteurs principaux ont été le mouvement islamiste et l'armée. Cette circonstance pose des sérieux problèmes et des pièges pour les masses dans tous les deux pays. Le peuple se tourne vers un de ces deux pouvoirs pour demander de l'aide contre l’autre. Dans le mouvement populaire en Turquie, la plupart des forces n’ont eu qu’un seul but: pour renverser le gouvernement despotique et exploiteur d'Erdogan, ils se sont convaincus qu'avec un coup d’État progressiste tout pouvait changer. Mais ils ont perdu beaucoup d’énergie et dix ans avec cette idée. Nous sommes contre ce genre de « solutions » car, cela reviendrait à mettre en place de nouveau un régime tyrannique et exploiteur sous l’emprise d’une autre fraction des classes dominantes.
Vous, en Égypte, pour vous sauver du régime de Moubarak, vous avez dû accepter le régime militaire du Conseil Suprême des Forces Armées. Ensuite, pendant un an et demi vous avez payé un grand prix pour renverser le régime militaire que vous avez eu en échange de la chute de Moubarak. Maintenant, quand le pouvoir du mouvement populaire a eu la force de renverser un autre tyran, l'armée veut dérober cette victoire et se mettre en scène. Que personne ne nous mal comprenne ! Contre Rabaa el Adawiyya, nous sommes avec Tahrir. Le renversement de Morsi est un acte révolutionnaire pour nous. Mais, nous pensons que le peuple a besoin d'une nouvelle direction indépendante de l'armée et des forces politiques des classes dominantes de l’Égypte.
En Égypte et en Turquie cette nouvelle direction ne peut être construite qu'avec le soutien du grand pouvoir de la classe ouvrière.
Pour cette raison, unissons-nous pour créer une direction de ce type dans chacun de nos pays. Apprenons de nos expériences, de nos échecs et de nos victoires. Etendons cette collaboration au Moyen-Orient, aux autres pays d'Afrique du nord et ensuite partout dans le monde. Le capitalisme est un système d'exploitation à échelle mondiale. La classe ouvrière et les masses travailleuses ne peuvent se libérer qu'avec la collaboration internationale.
Nous appelons nos frères et nos sœurs égyptiennes à lutter ensemble contre toutes ces pressions. Notre histoire passée nous a liés sous la coupe de nos Pachas et Sultans. Le moment historique que nous vivons maintenant nous appelle à nous battre afin de renverser toute exploitation et toute oppression. La force et la volonté dont nous avons besoin existe à Tahrir et à Taksim.
Cet article a été traduit en français par Nesrin Göksungur.