Akdeniz: Dünya devriminin yeni havzası!

The Mediterranean: new basin of world revolution!

البحر الأبيض: الحوض الجديد للثورة العالمية

مدیترانه: حوزه جدید انقلاب جهانی

Il Mediterraneo: nuovo bacino della rivoluzione mondiale!

Μεσόγειος: Νέα λεκάνη της παγκόσμιας επανάστασης!

Derya Sıpî: Deşta nû a şoreşa cihânê

Միջերկրական ծով: նոր ավազանում համաշխարհային հեղափոխության.

El Mediterráneo: Nueva cuenca de la revolución mundial!

La Méditerranée: nouveau bassin la révolution mondiale!

Mediterrâneo: bacia nova da revolução mundial!

La France et la peste bleue marine

Comme on l’attendait, les résultats des élections européennes en France ont vérifié le glissement de l’électorat vers l’extrême-droite néo-fasciste. (À noter quand-même que près d’un électeur sur deux a refusé de voter). Mais ces élections ont été éclipsées par la dissolution de l’Assemblée Nationale, et l’échéance du 30 juin et le 7 juillet pour de nouvelles législatives. Un coup d’État macronien.

Nous tenterons ici d’expliquer pourquoi ce glissement, quels pièges sont tendu par Macron et pourquoi la « gauche » n’offre aucune solution à la classe ouvrière et aux autres fractions de classes non capitalistes. Nous conclurons par ce que pourrait être une ligne stratégique de classe.

Les promoteurs de l’Union Européenne (UE) affirmaient que cette Union assurerait paix et prospérité aux peuples/pays membres de celle-ci. Quarante ans d’histoire ont enseigné le contraire. Tout est faux dans le récit européiste. En fait, dans chacun de nos pays respectifs, l’UE est une machine de guerre contre les classes ouvrières (sens large). Par contre, elle est aux mains des très grands capitalistes (haute finance, grand patronat, etc.) et promeut dérégulation et déréglementation, pour accroître sans entraves ni limites l’exploitation salariale d’un côté, des dividendes astronomiques de l’autre côté. Les riches n’ont jamais été aussi riches, au niveau mondiale et européen, la France n’a jamais compté autant de milliardaires qu’avec Macron.

En même temps, l’année dernière en France, 8 million de personnes ont dû recourir à l’aide alimentaire. Avant Macron, il y avait environ 500 morts par accidents du travail chaque année, soit 1,37 mort par jour ; 7 ans de pouvoir macronien plus tard il y a désormais plus de 2 morts par jour. Avec ses Ordonnances « Loi travail » du 22 septembre 2017 qui ont détruit le Code du travail, Macron parachevait aussi la destruction des CHSCT, destruction commencée sous Hollande avec les lois Rebsamen et El Khomry. Le lien est direct entre les choix de Macron et le nombre de morts : sa politique est criminelle. Comme est criminelle sa politique de destruction de l’hôpital public et les plus de 170 mille morts pendant la pandémie de Covid-19, morts qu’on ne peut imputer au seul virus. Cette politique trouve ses serviteurs zélés en France (comme dans les autres pays de l’UE), mais il faut souligner le rôle central de l’UE qui impulse cette politique et exige de nos pays respectifs l’alignement sans discussions sur un droit néo-libéral toujours plus restrictif et régressif. Le capitalisme néo-libéral, et le personnel politique qui le sert, sont profondément prédateurs et mafieux. À la veille des élections de 2022 nous avons rédigé un bilan partiel de cette politique et n’y revenons pas ici.

Revenus records du capital, d’un côté, pauvreté de l’autre côté, le creusement de inégalités suppose et ne peut exister sans glissement de plus en plus autoritaire du pouvoir de la bourgeoisie préparant le terrain au fascisme. Hitler n’a pu s’emparer du pouvoir d’État qu’après Brüning, Papen et Schleicher. Et ces derniers ne purent s’imposer qu’après que les Freikorps, la SA puis la SS se soient imposé dans les rues par la force bruteCette victoire nazie eut elle-même le préalable de l’écrasement de la révolution allemande, (dont l’assassinat par le ministre de l’intérieur socialiste Noske de R. Luxemburg et K. Liebknecht).

Si en Italie les choses furent un peu différentes, il y eut aussi un mouvement d’avancée révolutionnaire des classes laborieuses (conquête des Maisons du peuple, des bourses du travail, des Unions Locales,… (désigné « biennio rosso »,« les deux années rouges » - 1919-1920), c’est une pause de ce mouvement ouvrier conquérant qui donna le signal de la contre révolution. On vit alors se déployer le terrorisme squadriste (Squadrismo en italien – Squadrisme en français) bientôt organisés en faisceaux (faisceaux italiens de combat, Fasci italiani di combattimento) descendre la vallée du Pô pour s’achever par la marche sur Rome (prise du pouvoir par le fascisme). A. Tasca écrit du fascisme qu’il est une contre révolution préventive et posthume. Posthume parce que c’est une défaite interne à la classe ouvrière, son manque de programme et son indécision, qui a donné la victoire aux fascistes.

De nos jours, c’est finalement le couple UE néo-libérale et personnel politique national qui est la cause première de la montée en puissance des forces réactionnaires/fascistes. Mais à cette cause première, il a fallu en ajouter une seconde : la collaboration empressée de tous les réformistes (social-démocrates et post-staliniens – plus les écologistes qui eux, ne sont pas « de gauche »). Certes, les particularités nationales ont compté dans le calendrier et les modalités de mise en œuvre des politiques néo-libérales. Mais, par-delà et indépendamment des particularités nationales, il est saisissant de constater la cohérence et la convergence des « réformes » néo-libérales et des effets déstructurants et atomisants des politiques « néo-libérales » sur le corps social et sur les individus, dans les pays de l’UE et au delà. C’est sur ce terreau qu’est né et s’est développé le néo-fascisme ou, a minima, une combinaison néo-libérale au plan économique mais ultra autoritaire. Ce, une nouvelle fois, tant au niveau national (Sarkozy, Macron, Le Pen – père et fille, Zémour, Ciotti...) qu’européen (Haider, Wilders, Orbán, Duda, Tusk, Morawiecki, Iohannis, Mitsotákis, Meloni,...) et même mondial (Trump, Bolsonaro, Piñera, Macri, Erdoǧan, Milei, Modi,...).

On peut avancer que ce glissement vers l’extrême-droite, voire le néo-fascisme, a pour conditions a) la casse néo-libérale de ce qu’imprudemment on a nommé l’État social ; b) la mise en œuvre de cette casse néo-libérale par les « gauches »  même qualifiées de radicales par les médias bourgeois. Voir les gauches « radicales » que furent Syriza/Tsipras en Grèce, Podemos/Iglesias en Espagne, PT/Lula au Brésil, et d’autres exemples en Amérique Latine.

Car ces « gauches » ne sont radicales que dans la presse bourgeoise. On observe là, des tentatives faillites d’avance de restaurer l’ancien réformisme social-démocrate. Et l’on peut dire qu’il s’agit en quelques sorte de contre révolutions préventives et posthumes. Le dénominateur commun de ces « gauches radicales » est précisément de ne pas toucher, ni de près ni de loin, à la société bourgeoise ses rapports sociaux et son mode de production capitaliste. Alors que le capitalisme est en crise profonde et qu’il conduit l’humanité à sa perte. À ne vouloir qu’une demi-révolution, la « gauche radicale » n’engendre que des contre-révolutions complètes. Plus que jamais il faut faire connaître et partager la mise en garde affirmant que « le Front Populaire désarme la classe ouvrière et ouvre la voie au fascisme » (Trotsky, Programme de Transition, 1938).

En France, la candidature de Glucksmann (commune au PS et à Place Publique) a été faite pour nuire à LFI. La social-démocratie c’est encore et toujours la contre-révolution ! Le piège ayant en partie fonctionné, Macron a jugé possible un coup tordu. Les résultats des européennes à peine annoncés, très mauvais pour lui, l’intrigant président annonçait la dissolution de l’Assemblée Nationale et, dans la foulée, de nouvelles élections législatives le 30 juin et le 7 juillet, sans laisser le temps aux partis politiques de mener une campagne électorale. Une sorte de putsch légal commis au moment précis où Macron espérait que LFI ne représenterait plus un danger. Hélas, la réponse de la gauche a été quasi immédiate : on a vu la constitution du « Nouveau Front Populaire », plus large encore que la NUPES, puisque des syndicats et des associations se sont immédiatement joints à ce front. La NUPES posait déjà nombre de problèmes, le Nouveau Front Populaire en pose plus encore. On retrouve en son sein des gens peu fréquentables : Aurélien Rousseau, ancien ministre de la santé d’Emmanuel Macron et artisan de la réforme des retraites et de la Loi travail, il a été investi par Place Publique ce vendredi 14 juin pour être candidat du Nouveau Front Populaire dans les Yvelines. François Hollande, ancien Président socialiste de 2012 à 2017, haï pour les politiques anti-sociales, l’état d’urgence, le début des violences policières, la répression de la solidarité avec Gaza en 2014, pour le meurtre de Rémi Fraisse et de Adama Traoré par les forces de répression, pour l’expulsion de la jeune Leonarda, Hollande est aussi celui chez qui est né Macron. La candidature de Hollande est une bombe à retardement au sein de cette gauche, faite pour exploser lors d’une crise politique (qui ne manquera pas d’arriver), au moment opportun pour les forces de réaction. Il faudrait y faire face dès maintenant mais personne « à gauche » ne le fera, ni LFI, ni le PC, ni les écolos, et bien entendu pas les « socialistes ». Cette candidature caractérise ce « nouveau front populaire » : une magouille électoraliste, au service de la revitalisation du PS, dont les pires responsables de la montée de l’extrême-droite ces dernières années. Une politique qui, de fait, renforce le FN/RN. Enfin, on trouve un Glucksmann, pro-Europe néo-libérale, anti-social/anti-ouvrier, atlantiste pro-guerre et pro-OTAN, son rôle de conseiller impérialiste auprès de Saakachvili en Géorgie, le voici en position de peser sur les choix de ce « Front Populaire ». Il est, avec Hollande, Valls, Cazeneuve, Collomb, Cahuzac, Strauss-Kahn, et tant d’autres, cette catégorie de « socialistes » que l’électorat a licenciés en 2017. Leur seule présence au sein de ce Front Populaire est une garantie de défaites pour la classe ouvrière. La contre-révolution est déjà en marche à gauche de l’extrême droite. Elle précède même la révolution.

Il faut s’interroger : victorieux au sortir des législatives ce Front Populaire entrera-t-il dans un gouvernement avec Macron comme Président ? Le même président que celui qui s’associera avec le FN/RN en cas de victoire de Bardela/Le Pen ? N’est-ce pas, par exemple, l’artifice dont on parle depuis longtemps qui donnera à Macron la possibilité (après démission) de se représenter pour un troisième mandat ? Les résultats des européennes montrent que cette éventualité est grillée, mais le pervers, le déviant, a bien d’autres tours dans sa manche.

Plus que jamais, nous avons besoin d’une perspective indépendante des politiciens qui, au pouvoir, ont dégradé nos vies. Or, avant les élections de 2022 les militants de LFI avaient élaboré et discuté leur programme pendant des mois. Les résultats électoraux faisant, il a fallu conclure un pacte avec les partis « de gauche ». En à peine vingt-quatre heures le beau programme a été jeté à la poubelle.

Comment ce prétendu Nouveau Front Populaire peut penser être crédible ? Mais par-dessus tout, comment résister à la coalition de toutes les droites qui fera « hurler l'économie » comme la droite chilienne l'a fait pour préparer le putsch de Pinochet ? Doit-on laisser croire que le patronat français, et plus généralement la bourgeoisie française coopérera avec une « gauche » qui s’en prendra aux dividendes et à « l’optimisation fiscale » ?

Comment résister à la police fascisée sans la purger brutalement, comment résister aux militaires eux aussi pro-fascistes sans purger l’armée ? Rien ne le dit dans le programme du « Front populaire ». Et rien ne dit quelles sont les conditions minimums à créer pour imposer ce programme de Front populaire auprès du grand patronat de la finance (française et internationale). Comment combattrons-nous les groupuscules néo-nazi ? Comment combattrons-nous les mercenaires qui reviendrons d'Ukraine ?

Puisque nous savons que le Front Populaire désarme la classe ouvrière et ouvre la voie au fascisme, il faut de toute urgence déborder les bureaucrates des partis et des syndicats, ou bien nous serons soumis à leurs appareils, à leur pusillanimité, voire à leur trahison. Car, Hollande de retour, accompagné de Rousseau et de Glucksmann, c'est la trahison assurée.

Une autre stratégie s'impose. Elle suppose l’indépendance politique de la classe ouvrière, un programme (buts de guerre) et un parti révolutionnaire fiable, elle s'inspire de la lutte de la classe ouvrière allemande contre la tentative du putsch de Kapp (13 au 17 mars 1920).[1] Il faut le dire clairement : la « gauche » française en est incapable. Il n’a échappé à personne (pas même à nous) que notre époque et celle du putsch de Kapp ne sont pas identique. Nous ne préconisons pas le mimétisme mais la compréhension et l’intelligence.




[1] 2 Essai de définition du rôle d'un parti communiste ; XVIII: Le putsch de Kapp : https://www.marxists.org/francais/broue/works/1971/00/broue_all_18.htm