Suite à la seconde guerre mondiale, certains États (ou États-Nation) dont la France, ont acquis d’autres fonctions que les fonctions régaliennes. Pendant plus de 25 ans (1945 - 1970), la santé, la protection sociale, le système de retraites, l’enseignement de la maternelle à l’Université, le logement social, l’énergie (charbon, gaz, électricité), certains moyens de communications (la Poste, le téléphone,…), le transport ferroviaire, etc. ont été soustrait à la logique et aux intérêts du capital. Cette période, nommée « trente glorieuses », fut une période de croissance relative, (dû non à un nouveau cycle d’expansion du capital mais à l’effort de reconstruction post-guerre), cette période s’est achevée vers la fin des années 1960, du fait de certaines difficultés économiques liés aux théories économiques, le « keynésianisme », et à leur mise en œuvre.
Nombres d’économistes capitalistes, les néo- ou ordo-libéraux ont alors entrepris de défaire systématiquement ce qui avait été fait pendant la période keynésienne. Ces néo-ordo-libéraux ne sont pas des nouveaux venus quand ils réapparaissent au début des années 1970. Ils ont été les partisans et les acteurs de l’économie capitaliste qui, dans l’entre deux guerres, a (entre autres choses) conduis à l’hyper inflation en Allemagne, puis à la prise du pouvoir par Hitler et enfin à la seconde guerre mondiale. Des idéologues bourgeois ont dit d’eux qu’ils étaient radicalement anti-étatiques. C’est partiellement vrai : ils sont pour que l’action publique soit mise au service exclusif du capitalisme financier. Même au prix de la pauvreté ou de la misère des classes populaires. Leur premier « triomphe » après leur réapparition, date de septembre 1973, au Chili quand, suite au putsch militaro-fasciste de Pinochet (fomenté aux USA par la CIA), ces néo/ordo-libéraux ajouteront la misère à la terreur fasciste, aux exécutions sommaires, à la torture et aux « disparitions ».
En France, dès 1974, suite à son élection, Giscard d'Estaing, (un banquier lié au « Crédit foncier de l'Indochine » devenue Banque Indo-Suèze, puis Suèze,…). entreprend la destruction systématique de tout ce qui avait été fait depuis 1945. Les attaques, d’abord lentes (et pas toujours couronnées de succès) se renforcent après l’élection de Mitterrand, et la pause de 1981-1982. Ce sont les « socialistes » de la « deuxième gauche » (la droite et les « néolibéraux du PS - qui s’auto-désignent « sociaux-libéraux ») qui triomphent avec Jacques Delors, (ministre des Finances de 1981 à 1985, puis président de la Commission européenne de 1985 à 1995), Camdessus, (ancien Directeur du Trésor, puis Gouverneur de la Banque de France, puis du FMI) et des dizaines « d’apparatchiks » du PS plus réactionnaires les uns que les autres.
En quarante ans, cette politique néo-ordo-libérale, conduite avec autant d’abnégation par la gauche (PS et alliés) que par la droite (post-gaullistes), a tout bouleversé. Le capitalisme à prétentions sociales a cédé la place à un capitalisme financier de pure prédation. Le chômage est passé d’environ 30 000 chômeurs (au début des années 1970) à trois millions officiellement (en fait probablement plus de cinq millions), et si ce chiffre est plus bas aujourd’hui c’est surtout en raison de l’adoption de lois brutalement anti-chômeurs et de changements dans le mode de calcul du chômage. L’industrie a été gravement détruite, la quasi totalités des services ont été privatisés (la Poste, le Téléphone, la SNCF, l’eau, le gaz, l’électricité,…) et des services de l’État ont déserté les campagnes (mairies, administrations des finances, écoles, hôpitaux éloignés ou fermés) etc. De « l’État providence » des trente glorieuses est devenu l’État porte-flingues du Medef, du CAC 40, et des financiers de l’UE et de la BCE. La financiarisation du capitalisme mondial d’un côté, (qui fait qu’un actionnaire a plus intérêt à placer son capital dans des « produits » financiers que dans la production), les dogmes néo-ordo-libéraux (et leurs conséquences) de l’autre côté ont précipité le capitalisme dans la plus importante des crises qu’ait connu ce mode de production.
Avec cette crise profonde, systémique et quasiment existentielle qui secoue le capitalisme, les catégories sociales victimes de cette politique se sont étendu et ont gagné en nombre. Jusqu’à ce que de larges couches de population se radicalisent. Le mouvement des « Gilets Jaunes » exprime et illustre cette radicalisation. Alors, la bourgeoisie n’a plus supporté ni sa démocratie (pourtant formelle, faite par et pour elle), ni sa République, ni ses institutions. Elle a donc attaqué la République de l’intérieur de la République, elle a attaqué sa démocratie de l’intérieur de sa démocratie. La violence d’État a prolongé la violence économique. Les forces dites de l’ordre, ont reçu l’ordre de terroriser les manifestants. Dans un premier temps, les médias « main stream » n’ont rien vu, offrant aux macroniens de nier les violences. Mais les vidéos prises par des témoins et victimes ont fait voler en éclats censure et mensonge d’État. Alors toute la macronie, Président, ministres, députés, rejoints par nombre de politiciens de la droite « ordinaire » et de l’extrême droite, ont commencé à demander des lois toujours plus liberticides. Et tous les prétextes furent bons : terrorisme djihadiste, Gilets jaunes, virus, manifestations de flics, qui ont fait de la France un État policier. Il faut dire qu’avant même d’être élu, Macron annonçait qu’il entreprendrait une lutte contre les « fake news ». Sur tous les terrains, mise sous tutelle des collectivités territoriales, limitations du périmètre de compétence des parlementaires, inclusion des lois d’exception au droit commun, loi Avia, LPR (interdiction aux étudiants et personnels de manifester dans l’enceinte de l’Université) et désormais « Loi de Sécurité Globale » (qui entre autres choses met en cause les droits des journalistes), sur tous les terrains la bourgeoisie française renoue avec Versailles et Vichy.
Cette loi n’est que l’une des pièces, parmi d’autres qui, de proche en proche, montre une tendance de la bourgeoisie mondiale à l’anti démocratie et au fascisme.
Dans les années 1930, Trotsky a écrit des lignes qu’il est urgent de lire, de relire, de bien connaître, comprendre et discuter sur les moyens de lutter contre ce péril mortel qu’est le fascisme.
En France, de nombreuses réactions ont commencés à se faire entendre ces derniers jours. Des manifestations ont eu lieu malgré la répression. Cependant, sauf quelques exceptions on ne dénonce que la mise en cause des droits à l’information, certes très importante, mais l’enjeu dépasse de beaucoup celui de la presse. Car ce sont les droits politiques des citoyens qui sont attaqués. En France nous n’avons connu de telles attaques que sous le régime de Vichy (1940 – 1944) et pendant le putsch des généraux à Alger le 21 avril 1961.